Un petit arbre arbre qui pousse vite ?
C’est un désir souvent exprimé, une soudaine envie de verdure venue du fond de nos zones d’instincts, un besoin irrépressible de remplir l’espace d’un jardin encore tout neuf, un agacement profond de découvrir que le voisin a une vue imprenable sur notre petit coin de paradis ou cette perception lancinante que son pignon mange notre espace. Pour vivre heureux vivons arborés ! vivons cachés ! Sous une divinité tutélaire bien à nous cette fois, pleine de bruissements et de chants d’oiseaux, et dont la silhouette protégera notre droit légitime à profiter de notre espace, nos repas de famille sous le soleil, notre intimité.
Il faut qu’il ne soit pas trop grand de préférence. Aïe!… première contradiction. Car un arbre qui reste petit et qui pousse vite en est une. Il suffit de se balader un peu dans les arboretums , les parcs publics et les vieux jardins pour se rendre compte que le bout de bois chétif et à moitié chauve que l’on vient d’acquérir va devenir grand même s’il y a beaucoup plus grand que lui bien sûr, on nous a bien dit qu’il restait petit non ? Mais voilà: pauvres humains incapables de voir l’avenir, nous n’arrivons pas à regarder la nouvelle acquisition pour ce qu’elle est : aujourd’hui en adéquation à nos désirs, chacun y trouvera son compte en parfaite harmonie mais demain ? On découvre un jour que c’est un être vivant programmé pour pousser, grandir et prospérer, comme nous, et qu'il nous survivra.
Il faut qu’il soit persistant aussi, ce conifère fera l’affaire. Peu importe qui il est finalement, il doit remplir sa mission le plus vite possible. Parfois on le plante pour d’autres motifs. Le sapin de Noël chargé de symboles et que l’on vend maintenant en pot a repris miraculeusement sous le regard attendri des enfants qui nous exhortent à le faire revivre. Mais lui se fiche d’avoir fait la parade à Noël. C’est un géant, et qui plus est, trouve notre région et notre sol tout à fait à son goût.
Je me souviens de ce conifère plein de santé qui me servait de repère le jour du solstice d’hiver. J’observais sa flèche grandir depuis des années en me disant que les propriétaires de ce jardin avaient bien de la chance de posséder un si joli spécimen. Ce devait être cedrus deodara (cèdre de l'Himalaya) sans doute le plus beau des conifères à mes yeux, une silhouette de conte de Noël,un peu pleureuse, élégante et romantique .Cette année la tronçonneuse est passée. Seul le tronc est encore là avec quelques branches qui pendouillent. Mais on a bien le droit de profiter de la lumière. On a bien le droit aussi, parfois l’obligation, d’abattre l’arbre s’il ne nous convient plus, s’il nous porte préjudice.
Pourtant, un compromis est possible ; des idées germent : certains grands arbres qui supportent la taille conviennent parfois mieux que des petits qui deviennent trop grands, et parfois aussi la patience a ses vertus : un petit arbre plus lent se révèlera être le compagnon idéal. Oui, aussi, bonne nouvelle: des arbres de taille raisonnable et qui poussent vite ça existe! (voir liste sur le blog). Enfin rien ne remplace les professionnels et leur expérience : conjuguer cahier des charges , tranquilité,bonheur et beauté n’est pas impossible. Le choix de végétaux toujours plus impressionnant et les efforts des obtenteurs sont à nos pieds, là où l’on protègera les racines de notre convoitise, et où poussera la perle rare.